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Collo, la maison où je suis né.
Par Jean Pierre Terrades. 2002.


Maison natale de l'auteur C
ollo, département de Constantine, été 1954. Il fait chaud. La presque île étend son ombre de géant sur la baie des jeunes filles. Ah, la baie des Jeunes Filles, enchanteresse, avec son sable fin et chaud, son eau claire et limpide qui m’a porté lors de mon apprentissage de la natation. Et la Fontaine des Sangliers dont la plage s’étend tel un ruban d’or sur 7 Kms au pied des chênes lièges et autres pinèdes, avec sa source d’eau fraîche, qui coulait encore en 1990.

Collo, mes souvenirs reviennent au galop, et je me mets à rêver que j’y suis encore…L’usine de liège (La SFLO si je me souvient bien), au pied du mont Sidi Achour, avec ses parcs de grosses balles de liège, empilées irrégulièrement et qui s’étalent à perte de vue dans un labyrinthe de ruelles sans fin, tel un vieux village noirci par la poussière des ans. C’était notre terrain de jeux favori, avec les copains, Algériens et Français.

Le port de Collo par l'auteur en 1990
Collo et son petit port de pêche, tranquille, sympathique, qui s’animait chaque jour avec le retour des pêcheurs chargés de crevettes et poissons de toutes sortes. Et je suis là, assis sur le quai, les jambes pendantes au dessus de l’eau, un petit seau de « Bromège » (appat) à coté de moi, et je pêche au fil du temps qui passe, dans la paix et le calme, avec les clapotis de la mer qui chante à mes oreilles…

Collo où mon grand père maternel (Jean Castellin) repose dans un sommeil éternel.

Collo, j’y suis né, j’en suis parti, j’y suis revenu et nous voilà en 1954 et il faut encore repartir, à mon grand regret, mais avec la ferme intention d’y revenir…J’y reviens en effet, plusieurs fois entre 1956 et 1960. Mais à cette époque, ma petite tète de gamin innocent n’aurait jamais imaginé que quelques années plus tard, cela serait un départ définitif !

L'auteur à la barre, quittant Collo. En fait, j’y reviens pour quelques jours en 1990 après avoir traversé la Méditerranée en voilier. J’y ai trouvé un accueil formidable de la part des colliottes, surtout quand je me suis présenté. Merci à ce restaurateur de la rue principale, qui avait connu mon Grand Père et mon Père, qui m’apportait le matin, le pain pour ne pas faire la queue à la boulangerie et qui m’a procuré une voiture avec un chauffeur pour aller revoir Bessombourg….Merci à ce vieil épicier qui avait aussi connu mon Grand Père et qui a tout fait pour me rendre service…

Collo, ma ville, te reverrais-je un jour ? Je l’espère de tout coeur si les hommes de bonne volonté...

Mais revenons en 1954...

Nous déménageons, Arris, les Aurès, et hop, me voilà en pension en 6ème au collège de Batna. Mon père enseigne la mécanique au lycée technique d'Arris. Une petite fête au village pour l'accueil de l'instituteur Monnerot et de sa femme. 1er Novembre 1954, l'horreur, l'instituteur Monnerot est tué dans une embuscade en venant au village pour les vacances. Sa femme est blessée et un notable Algérien est tué également.


Maison où l'auteur  à habiter Branle bas de combat au village, me voilà à douze ans avec un fusil, pour garder une des entrées du village avec mon père, en attendant l'armée. Ils arrivent les paras, quelques jours après, pas question de retourner au lycée, me voici embarqué dans le premier convoi sur Batna, et en prime une interview de l'Echo d'Alger et enfin une bonne paire de gifles par le principal du lycée pour mon retard.

Puis c'est la Légion qui prend ses quartiers et réquisitionne le lycée technique et d'autres locaux prés de la maison. On joue avec des copains et on tombe sur une salle où un "Fell", est passé à la gégène par les légionnaires qui la veille étaient tombés dans une embuscade


Mon père est au chômage. Il boit et c'est le divorce des parents. Constantine, moi en pension chez une tante, ma mère à Alger, deux ans sans la voir. Juillet 1958, je me tire sur Alger, je retrouve ma mère, femme de chambre logée avec ma petite sœur dans une chambre de bonne à l'hôtel Alleti, pas de place pour moi mais je reste et je vais travailler et chercher. J'ai trouvé un appartement à la Pointe Pescade et à Saint Eugène ensuite, un groupe de maison sur les rochers au dessus de l'eau sur le boulevard Front de mer.


Collo, vue sur la baie des jeunes filles en 90Et cela continue, La Pointe Pescade et sa bombe, et Palestro avec ses appelés, le ventre ouvert, le sexe dans la bouche et El Alia et les traitres, (communistes) : Raymonde Péchard, la poseuse de bombes et le Lieutenant Maillot et la vie continue avec ses horreurs. Je suis là, dans le bus, une grenade, bon Dieu, elle est pratiquement à mes pieds (noirs...) et je ne bouge pas, elle n'explose pas...

24 Janvier 1960, les barricades, j'y suis, des coups de feu, cela tire, je prends mes jambes à mon coup... Avril 1961, c'est la grande joie et rapidement la grande illusion, l'OAS, quelques copains dans le coup, moi je colle des affiches, un bon copain, un kabyle, il y est jusqu'au cou, les mortiers cela le connaissait.


26 Mars 1962, l'horreur, je ne passe pas, l'accès est bouclé. J'ai hissé un immense drapeau sur un poteau électrique prés de la maison. C'est la fin, je décide de m'engager pour l'école de l'air de Rochefort et j'arrête de travailler fin avril 1962, départ prévu le 23 Mai 1962. Quelques semaines de vacances et d'horreur, Dieu ce que j'en ai vu des gens tomber pendant cette période. J'attends encore le bus pour renter et soudain une voiture en face de moi explose... Je suis projeté au moins à vingt mètres, je me relève et je n'ai rien...
Fin mai 1962, me voici en uniforme de troufion de l'armée de l'air sur le Kairouan, beau paquebot, ça tire de partout sur les hauteurs d'Alger.


Le port de Collo par l'auteur en 1990 Adieu mon pays, mon drapeau hissé au sommet du poteau sur le front de mer de Saint Eugène vient de s'écrouler. C'est une rivière de sang qui s'écoule à ses pieds, des visages passent dans son lit, les yeux globuleux, la bouche grande ouverte et j'entends comme une complainte lancinante, pourquoi, pour qui...?
Adieu Collo, Bessombourg, Constantine, Arris, Batna, Alger, Adieu...

Juillet 1990, j'y retourne en voilier, avec mon épouse, une Guardoise des environs de Nîmes et des amis Bretons. Je traverse la Méditerranée et j'entre dans ex Philippeville, aujourd'hui Skida. J'entre aussi dans le petit port de pèche de Collo, la maison où je suis né, les souvenirs s'entrechoquent, les copains, la famille, ma vie de gamin et d'adolescent, je pleure...

Voilà...


Photo de classe de CM1-CM2

 

 

 

 

 

 

 




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Je contemple souvent la photo de la classe Cours Moyen 1ère année de Collo, (1950-1951 sûrement),Quelques noms me reviennent à l’esprit…Duplan, Boutillier Jean Marie, le fils Apréa, Jean Pierre Danastas (que je viens de retrouver grâce à Internet… ) et les autres...voudront ils se faire connaitre ?

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